Combats à Douala en 1884

Extraits d’un compte-rendu d’une revue française

En 1862  les maisons allemandes Goedelt et Wœrmann de Hambourg fondèrent à Sierra-Leone, sur la Côte-d’Or, au Gabon, leurs premiers comptoirs. En 1874, deux agents de la maison Wœrmann, MM. Jantzen et Thormälen, fondent leurs premières stations ; nous les voyons aujourd’hui à Grand-Batanga, à Éloby, au fleuve Campo, au Gabon; en 1879, ce sont deux autres employés des Wœrmann, MM.Wölber et Brohms, qui s’établissent à Grand et Petit Popo, à Lomé, à Bagida; les Wœrmann, qui ont ouvert la voie en 1862, font des progrès constants, et en 1884 ils ont le service postal de Hambourg à la côte occidentale d’Afrique, avec soixante postes, depuis Libéria jusqu’au Congo. Nommons seulement les maisons Gaiser, Gœdelt, Voigt de Hambourg, et les Brêmois Bode, Victor, et enfin Lüderitz, qui devait en 1884 donner à l’Allemagne une colonie nouvelle, Angra-Pequeña (Lüderitzland).

L’Allemagne avait donc en Afrique de puissants éclaireurs, le jour où le prince de Bismarck, entraîné par ce mouvement général qui venait de lancer l’Italie sur les traces de l’Angleterre et de la France, se décida, malgré l’opposition souvent inintelligente du Reichstag, à faire lui aussi de la politique coloniale. Ce fut sur eux  qu’il s’appuya pour faire ses premiers pas dans cette voie nouvelle, qu’il prétendait suivre pacifiquement.
[….]
Le prince de Bismarck, après avoir conféré le 28 avril 1884 avec les principaux représentants du commerce africain, notamment Wœrmann et M.Colin, qui venait de créer un comptoir à l’embouchure de la Dubreka (rivières du Sud), adressa le 19 mai au Dr Nachtigal, Consul général à Tunis, ses instructions pour une expédition à diriger en Afrique comme commissaire général de l’Empire. Celui-ci, auquel était adjoint un homme très instruit des questions africaines, le Dr Büchner, devait proclamer le protectorat allemand sur les Popos, sauf respect des droits antérieurs de la France, prendre possession de Kamerun et des côtes voisines, enfin à Angra Pequeña mettre en échec la politique anglaise, qui d’ailleurs sur les trois points se trouvait en conflit avec celle de l’Allemagne. Une note du mois d’avril informa les puissances que le Dr Nachtigal avait reçu la mission « d’étudier les intérêts allemands sur la côte occidentale d’Afrique ». […]
A l’époque qui nous occupe, quatre chefs se disputaient assez pacifiquement la prépondérance sur le delta du Kamerun, principal centre commercial du pays, Bell, Acqua (sic) et Lock Presso (sic) sur la rive gauche, Joss Dido sur l’autre bord du fleuve, les deux derniers dans un certain rapport d’infériorité avec les précédents.


Dès 1874, l’activité chaque jour plus entreprenante des commerçants allemands avait amené des difficultés avec les Anglais qui, disaient-ils dans une pétition adressée au chancelier, les excluaient de leur «Court of Equity» et jugeaient ainsi souverainement tous les litiges. Les indigènes acceptaient alors, demandaient même le protectorat de l’Angleterre qui, ne voulant point prendre la charge d’une colonie nouvelle que nul ne lui disputait encore, faisait répondre à leurs propositions par des atermoiements.
Mais les Allemands, ayant profité de cette inaction pour amener les trois chefs Bell, Acqua et Dido, à demander le protectorat impérial, leurs rivaux n’eurent pas de peine à obtenir d’eux des engagements contraires, qui semblaient anéantir les projets des négociants hambourgeois. Ceux-ci, encouragés par le prince de Bismarck, passèrent alors avec les chefs de la côte entre Kamerun et le Gabon une série de contrats d’acquisition de terre, et par une manœuvre habile, persuadèrent aux rois de Kamerun de se placer non sous la protection de l’Empire, mais sous celle des commerçants allemands, ce qui n’était en rien violer leurs engagements envers l’Angleterre, les commerçants se placeraient ensuite sous le protectorat impérial. C’est dans ces circonstances favorables, le lendemain même de la signature du traité avec Acqua, que la Möwe jeta l’ancre dans la baie de Kamerun (Douala), accueillie avec enthousiasme par la colonie allemande, le 11 juillet 1884.

Le Dr Nachtigal s’empressa de confirmer les traités, et dans leurs longues barques bariolées, Bell, Acqua et Dido vinrent avec leurs guerriers saluer à bord le commissaire impérial. Lock Presso, peut-être plus attaché aux Anglais, demeura seul introuvable, mais  M. Nachtigal, sans plus s’embarrasser de sa disparition, le considéra comme vassal de Bell et lié par l’engagement de celui-ci. Le 14 juillet, le drapeau allemand fut hissé à Belltown, Acquatown et Didotown, aux « Hoch » des commerçants allemands, puis le commissaire impérial visita les cinq maisons anglaises de Kamerun et la mission méthodiste de Victoria, assurant partout des intentions amicales du gouvernement allemand, qui s’efforcerait de conserver avec les Anglais de bons rapports et respecterait tous leurs droits.
Une période de pluies torrentielles, sa propre santé déjà chancelante et la nécessité de faire quelques réparations à la Möwe, qui avait filé son maximun jusqu’à Kamerun, forcèrent le Dr Nachtigal à rester dans la nouvelle colonie jusqu’au 20 juillet, et lui fournirent l’occasion de régler la question de la « Court of Equity », et d’assister à un événement qui ne dut pas médiocrement le réjouir. Le dimanche 19 juillet, la canonnière anglaise Flirt entrait en rade, ayant à bord le consul Hewett, qui venait proclamer sur toute la côte le protectorat britannique.
Voulant tenter un dernier effort, il convoqua à son bord les quatre chefs qui jadis avaient promis leur dévouement au gouvernement anglais, mais seul Acqua eut le facile courage de se rendre à son invitation, et, fort de la présence de la Möwe, ne se laissa point séduire par ses propositions ni intimider par ses reproches. Après une entrevue avec le Dr Nachtigal, au cours de laquelle il protesta énergiquement contre l’occupation allemande, M. Hewett quitta Kamerun pour se rendre au delta du Niger, tandis que la Möwe continuait son voyage, laissant dans la colonie M. Büchner comme gouverneur provisoire.

la Möwe


La côte septentrionale de la baie de Kamerun (Bimbia), dont les habitants étaient groupés en trois villages, Williams-Money et Dukullutown, sous l’autorité de conseils d’anciens et la domination purement nominale du roi Bell, avait été placée sous la « protection» des maisons Wœrmann et Jantzen et Thormählen par des traités devant lesquels le commandant du navire anglais Opal, venu le 19 juillet pour procéder à une annexion, crut devoir se retirer; le 21, M. Nachtigal fit hisser solennellement le drapeau impérial par un officier de la Möwe. Le 22 il confirma à Malimba, sur la côte méridionale de la baie, le traité passé le 20 entre le roi Jambo et M. Rabenhorst, agent des Wœrmann, enfin du 23 juillet au 10 août, il poursuivit sur la côte, entre Petit-Batanga et les possessions espagnoles d’Elobey, une campagne fort habile de conclusion ou de confirmation de traités et de déclaration de protectorat, dans laquelle il profitait de toutes les situations obscures pour mettre de son côté la supériorité du fait accompli, tout en faisant les réserves les plus cordiales sur les droits indiscutables de la France au sud de Grand-Batanga. Il accentua cette attitude en faisant le 10 août une visite au gouverneur du Gabon, et d’accord avec lui, décida d’en référer aux deux gouvernements pour procéder à une délimitation; mais déjà l’Allemagne avait pris une position diplomatiquement avantageuse, grâce l’intelligente initiative de l’agent de M. de Bismarck.

M. Nachtigal ne voulant point, après s’être exactement rendu compte des faits, laisser de traces d’une violation trop évidente de nos droits, revint au Gabon vers la fin du mois d’août 1884 et amena le 18 le drapeau allemand qui avait été arboré par lui sur la rive gauche du Benito. Le 28, il rentrait à Kamerun et déployait le pavillon impérial sur Hickory-town, dont le roi Lock Presso avait reparu.

La conquête était finie. Après avoir réuni à Friedrichsruhe le 25 septembre 1884 les chefs des grandes maisons allemandes établies sur la côte africaine et arrêté avec eux les principes de l’organisation des nouvelles possessions, le prince de Bismarck adressa aux puissances une note ainsi conçue (octobre 1884) :

« Le gouvernement de Sa Majesté Impériale, pour protéger d’une façon effective le commerce de la côte occidentale d’Afrique a pris sous son protectorat quelques territoires de cette côte, en vertu soit de traités que le Dr Nachigal, Consul général en mission dans l’Afrique occidentale, a négociés avec des chefs indépendants, soit de traités de protectorat de sujets de l’Empire qui ont acquis certains territoires par des traités avec des chefs indépendants.
En conséquence sont placés sous le protectorat de Sa Majesté Impériale sur la côte des Esclaves le territoire de Togo avec les ports de Lomé et de Bagida; dans la baie de Biafra les territoires de Bimbia avec l’île Nikol (île de Nicholls, au large de Bimbia), Kamerun, Malimba (y compris la partie septentrionale), Petit-Batanga, Plantation de Criby (Kribi); dans l’Afrique sud-occidentale la côte entre le cap Frio et le fleuve Orange, à l’exception de la Walfish-Bay. Comme signe extérieur de ce protectorat, le drapeau militaire de l’Empire a été hissé et des bornes ont été des tiers seraient respectés.»

Jusque-là, les choses s’étaient passées à Kamerun d’une façon étrangement simple et rapide; il avait suffi au Dr Nachtigal de paraître et de hisser quelques drapeaux pour gagner tous les cœurs et effacer l’influence des longtemps acquise par l’Angleterre.
Il avait suffi au prince de Bismarck de quelques lignes adressées aux puissances pour que Kamerun fût sans effort annexé à l’Empire. Le Dr Büchner et les négociants allemands ne tardèrent point pourtant à se heurter à deux obstacles : les menées actives des Anglais, et l’hostilité des indigènes. L’estuaire du Kamerun et du Mungo forme en lui-même… un territoire sans aucun avenir commercial ou agricole; il n’est qu’une porte ouverte sur le commerce du bassin du Bénoué et du Congo septentrional, aujourd’hui monopolisé par les indigènes.

La politique de l’Angleterre était naturellement, en s’emparant du massif de Kamerun et du haut Mungo, de couper la nouvelle colonie du bassin du Niger que Flegel explorait à ce moment même. Elle trouva pour tenter cette opération le Polonais Rogosinski qui, avec plusieurs de ses compatriotes, notamment Tomaczek et Janikowski, venait de faire d’intéressantes explorations sur les côtes mal connues de la baie de Biafra. Il prit pour centre d’opérations la station méthodiste de Victoria, enclave de la nouvelle colonie allemande, et muni des pleins pouvoirs du consul Hewett, il signa au nom de l’Angleterre des traités de protectorat avec les chefs de cette région montagneuse, qui s’étend de la baie d’Ambas à l’estuaire du Rio del Rey, et qu’il avait déjà plusieurs fois parcourue. Le D’ Nachtigal, revenu du Gabon à la fin d’août 1884 pour annexer cette région à l’établissement de Kamerun, reçut de Rogosinski la leçon d’activité qu’il avait lui-même donnée au consul Hewett, le 19 juillet précédent, et dut se retirer devant le pavillon britannique.

A Kamerun même, le vice-consul anglais Buchan aidé du représentant de la maison John Holt et C’°, ne se faisait point faute de mettre à profit une situation troublée. Nous avons vu que les deux chefs sur l’amitié desquels le Dr Nachtigal avait pu compter et qu’il avait  naturellement traités comme les principaux, n’exerçaient en réalité qu’une autorité limitée, et Lock Presso, roi d’Hickory-town, n’avait point pardonné aux Allemands, malgré son adhésion ultérieure au protectorat impérial, d’avoir en son absence disposé de lui comme d’un vassal de Bell. Hickory-town devint le centre d’une agitation anti-germanique, à laquelle prirent bientôt part une partie des guerriers d’Acqua sous la conduite de son frère Manga, et la majorité de ceux du « puissant » Bell, excités par le chef Élami Joss contre cet ami des Allemands qui, disaient-ils, n’avait même point partagé avec ses sujets l’or que les envahisseurs lui avaient donné.

Un jour Bell-town fut réduite en cendres par les hommes de Joss, et le pays se trouva dans cette agitation dont une nation européenne profite souvent pour intervenir, « protéger ses nationaux », et s’emparer du pays. Mais cette fois encore l’Angleterre se laissa distancer par l’Allemagne, et, tandis qu’il amusait lord Granville de notes et de réclamations diplomatiques, le prince de Bismarck envoyait à Kamerun deux navires de guerre, l’Olga et le Bismarck; l’amiral Knorr déployait son pavillon en rade le 18 décembre 1884.

Nous croyons devoir raconter avec quelques détails les faits qui se passèrent à Kamerun les 20, 21 et 22 décembre; ils montreront comment l’Allemagne entend se servir de sa force dans ses tentatives coloniales, même contre des populations qui, comme nous le verrons plus loin, ne sont rien moins que belliqueuses malgré les fusils dont elles sont armées. Nous prendrons pour guide un témoin oculaire. M. Hugo Zöller, correspondant de la Kölnische Zeitung, qui en 1885 a fait une relation enthousiaste, reproduite par la Kolonialzeitung (pp. 97 et 123) et par la plupart des journaux allemands.

Après une entrevue avec les principaux représentants de l’Allemagne à Kamerun, le Dr Büchner, gouverneur intérimaire, les Dr Passavant et Pauli, MM. H. Zöller, Schmitt de la maison Wœrmann et Voss de la maison Jantzen et Thormählen, l’amiral Knorr décida qu’on mettrait 330 hommes à terre, avec ordre de prendre Hickory-town, résidence de Lock Presso, et d’y mettre le feu. Joss-town, sur la rive gauche, résidence d’Élami Joss, aurait ensuite le même sort. C’est pour cette besogne philanthropique que les deux vapeurs de commerce Fars et Dualla débarquèrent sur les deux côtes de la presqu’île où était bâtie la première des villes condamnées, l’un 216 hommes du Bismarck, avec le capitaine Karcher, l’autre 115 hommes de l’Olga, sous les ordres du lieutenant Riedel, tous en tenue de guerre, avec une demi-journée de vivres et 60 cartouches ; les deux steamers apportaient en outre un canon-revolver et trois canons de 8 centimètres en bronze avec 72 projectiles.

Joss-town incendié par les troupes de débarquement allemandes

Après avoir tranquillement débarqué à 9h 40 du matin, les hommes de l’Olga ouvrent le feu sur des nègres qui, «brandissant leurs fusils, cherchent à s’enfuir et ne se tiennent pas tranquilles malgré nos cris». Sous la conduite des Drs Passavant et Pauli, on entre dans un village d’où quatre nègres s’enfuient, l’un d’eux en déchargeant son fusil; on les tue tous les quatre; on fait sauter une maison où l’on trouve de la poudre et des armes, et un bâtiment que le Dr Passavant indique comme appartenant à Lock Presso est livré aux flammes. Tandis qu’elle cherchait à se réunir aux hommes du Bismarck vers Hickory-town, la petite troupe est rejointe par un agent des Wœrmann, qui leur raconte qu’à la nouvelle du glorieux fait d’armes des marins allemands, les nègres ont envahi Bell-town et ont emmené comme otage un agent allemand, nommé Pantänius. Le lieutenant Riedel fait aussitôt embarquer ses hommes, en envoie une partie avertir les marins du Bismarck et se dirige vers Bell-town de l’autre côté du fleuve, « malheureusement sans guides, le Dr Pauli connaissant insuffisamment le pays et le Dr Passavant ne se trouvant pas bien ».

prise de Bell-town par le groupe de débarquement de la corvette allemande Olga

Quand le lieutenant Riedel et ses hommes arrêtent leurs embarcations au pied d’une pente assez rapide et haute d’une centaine de pieds, ils sont accueillis par un feu nourri que les indigènes cachés dans les arbres et les hautes herbes croient diriger à l’abri. Pourtant, dès que les Allemands font mine de débarquer, les nègres se sauvent au plus vite derrière des taillis plus éloignés de la rive. Mais la marche en avant devient difficile, les marins tirent à tort et à travers sur un ennemi invisible, qui reprend courage en voyant plusieurs de ses balles atteindre leur but (un tué et neuf blessés), le lieutenant n’ose lancer ses soixante hommes contre les trois ou quatre cents guerriers qui l’entourent. Les cartouchières ne contiennent plus que deux ou trois coups (il y a une heure et demie qu’on a débarqué); il est grand temps que les hommes du Bismarck arrivent.
Débarqués à 9h30, ceux-ci ont repoussé par quelques coups de mitraille des indigènes massés sur les rives. Ils sont entrés dans un village de Lock Presso, Old King Bells-town. Reçus par quelques coups de fusils, ils ont tué des indigènes qui se sauvaient et ont mis le feu aux maisons; l’incendie s’est répandu dans les hautes herbes et « cela a causé un véritable feu de prairie ». Rejoint par le roi Bell et ses guerriers dans les accoutrements les plus bizarres, le capitaine Karcher apprend à 1h 50 les événements de la rive droite et à 2h20 quitte le bord, salué par quelques coups de feu.

Attaque de la marine allemande contre les rebelles de  Joss-town et de Hickory-town

Les marins des deux navires une fois réunis ont facilement raison des noirs, qui maintenant ne sont guère plus nombreux qu’eux. Joss-town est prise, on tue tous les nègres qu’on rencontre, les officiers ne tiennent plus leurs hommes qui arrachent les noix de coco pour se désaltérer et brisent tout, énervés par les deux heures qu’ils viennent de passer. Enfin ordre est donné de mettre le feu à la ville, «mais les palmiers et les bananiers plantés entre les maisons empêchent les flammes de se propager et il faut les allumer l’une après l’autre.»

On ne trouve aucune trace de Pantänius et l’on apprend dans la soirée qu’il a été tué par Élami Joss pour venger la mort du premier chef tombé sous les balles allemandes. Les troupes vont camper, partie dans le Hülck des Jantzen et Thormählen, partie dans la factorerie Wœrmann à Acqua-town. «La ville en flammes d’Élami Joss éclaire l’horizon et jusqu’au milieu de la nuit offre aux regards un magnifique spectacle. »

Le 21, Manga Acqua fut livré par son frère Acqua, mis aux fers et emmené à bord. Joss-town, dont on croyait les ruines occupées par Élami Joss, fut reprise, sans qu’on eût pu tirer un coup de fusil, sauf sur des pillards, qui se trouvèrent être des hommes d’Acqua, des alliés de l’Empire.
Le 22, l’amiral Knorr profita de la marée montante pour approcher de la rive, l’Olga, dont les canons se chargèrent de la dernière partie du programme : l’incendie d’Hickory-town. Le même jour, l’amiral menaça d’expulsion les perturbateurs à quelque nation qu’ils appartinssent, et interdit le commerce des armes et de la poudre, dans une proclamation que le conseil anglais Buchan s’empressa d’approuver. Les jours suivants, on enterra Pantänius, et le matelot de l’Olga, et les nègres tombés dans la lutte.
Le 25, les marins fêlèrent joyeusement la Noël, avec Bell et ses guerriers. La paix était désormais constituée sur des bases solides.

Les événements de Kamerun eurent en Allemagne un retentissement – les ennemis de la politique coloniale déplorèrent le sang allemand versé pour un égorgement d’êtres inoffensifs. Voici un spécimen de la littérature ainsi éclose :

« Ce sont les premiers fruits de cette semence,
Le combat qui s’est déroulé au Cameroun,
C’est la malédiction de cette action rapide,
La moisson sanglante que vous avez gagnée !
Est-ce trop peu, ce qui repose en France ?
Que vous ne puissiez pas embellir les « os allemands » ?
Vous ne considérez pas le sang des fils allemands comme suffisant,
Vous fertilisez le sol de zones lointaines !
Ils sont tombés au combat pour le droit et l’honneur allemands,
Les centaines de milliers qui gisent en France
Car notre peuple se défend volontiers,
S’il ne s’agit que de vaincre dans le hit-parade de la patrie.
Maintenant, nous devons nous battre pour la folie,
Pour un fantôme créé par la folie,
Avec de pauvres gens qui ne nous ont rien fait.
Oh, un tel combat souille les armes allemandes ! »

M. Gaudefroy-Demombynes- extraits- Revue de Géographie. 1887. – BNF


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